SUSAN MENDE

SOURCES, Quelle
(exposition 2023)

L’ÉCLOSION MYSTÉRIEUSE

Au-delà de ses enracinements nordiques, boréens, en particulier germaniques, c’est à sa puissante magnétisation par le lieu méditerranéen et son prodigieux creuset créatif, artistique et religieux,  alliée à sons sens artistique subtilement féminin que nous devons d’abord la singularité de l’univers pictural et figural de Susan Mende, nourri de ses contemplations, des éblouissements et des méditations résultés de ses explorations riveraines et insulaires, de son inlassable quête de lectrice et de spectatrice du monde, des êtres et de leurs œuvres, mais aussi de sa discrète activité d’historienne d’art centrée par une Provence de haute mémoire, où, de cloîtres ombreux en lignes de crêtes et ciels violets, ses pas n’ont cessé de rejoindre et de recouper ceux d’imposants immigrés prédécesseurs…

Au-delà des bonheurs sensuels de ses teintes, et de ses matières, dont les recherches la retinrent longtemps, ce n’est pas à quelque nostalgique réminiscence ou catalogie fantaisiste des figures et des composantes de mythes en ruines que nous invitent l’art, pour mieux dire la pratique de S. Mende, mais au partage des intuitions issues de la considération que ces données suscitent en elle et de l’interrogation qui s’ensuit de leurs potentialités vivantes, de leurs pouvoirs psychiques inéluctablement perturbés voire neutralisés à l’érosion du temps occidental – à la suprématie duquel précisément semble s’être naturellement opposé longuement le monde méditerranéen – et le dévoiement en lui, ce temps, des langages iconologiques soumis aux machinations réductives c’est-à-dire finalement aliénantes du monothéisme théologique puis rationaliste.

Au revers de ce partage, et des enjeux qu’il comprend

                                                                                         – et de l’accès qu’il offre à ses temples labyrinthiques ouverts, aux approches souvent circonvolutives, spirales, quelquefois surplombantes, tapissés de lambeaux de frises, de rinceaux, à ses profusions de personnages volontiers surgis du sein de la méchanique (c’est-à-dire du théâtre) cosmique, des grâces merveilleuses de l’imaginal maritime antique (de l’écume duquel émerge la sirène), ou plus récemment avatars de hautes mathématiques étrangement orientées par leurs inclinations à la lucidité poétique, escortés de leurs bestiaires propitiatoires, de toute une animalité indistinctement hiératique, totémique, émue et facétieuse, situés d’étranges objets d’élection (dont certains récurrents, quelquefois longuement : la palme-pagaie-sagaie, l’échelle ondoyante de branchage, d’algue ou de filet…) propres à de nouvelles dévotions primitives et conciliantes qui restent à inventer, toujours épurés en direction de leurs symboles, c’est-à-dire des signes des forces opératives dont cet art nous donne d’entendre qu’ils en demeureraient essentiellement porteurs – et cela d’autant plus sûrement que la vision de S. M. ne conserve souvent d’eux que tels fragments (détails ou aspects) dont les conjonctions sont pressenties comme propres à la réanimation de leurs radiations initiatiques –

                                                                                        , c’est en définitive à l’élaboration d’un langage à quoi nous assistons, d’un langage («la poésie, mesdames et messieurs…») dont le dire lumineux n’exclue pas plus allégeance au simple vocatif de la contemplation que la foison floréale d’un jardin en mai n’a préséance en lui sur l’unique instant d’éclosion psychique de la rose ou de la mélitée du plantain, que le déploiement constellaire et le scintillement de la mer étale sur le lever de grâce érotique de l’Étoile du Matin ou que le silence des nécropoles de Délos ou de Tarquinia sur la ponctuation de l’immortelle…

le langage d’un dire en appelant certes à l’improbable harmonie espérée des êtres et des choses, mais que l’émerveillement en lui demeuré solidaire de l’enfance gracie des circonlocutions pesantes de la définitive tragédie d’être,

d’un dire de l’éclosion, oui, de l’éclosion silencieuse d’éclairages obliques sur les choses qu’il reste à notre regard, à notre gré, de mettre en perspectives, en reliefs du monde tel qu’il nous est offert d’y être au lieu que d’y être assignés,

d’un dire en appelant en nous, en somme, à voir ce monde tel que nous devrions le devenir…

              (B. Mialet. Thémis – La Pierre d’ombres, solstice d’hiver 2022.)


INFORMATIONS PRATIQUES

Vernissage 21 janvier à partir de 19h30 :

en présence de l’artiste Susan Mende

avec lectures par Bernar Mialet

et concert par Arsène Tryphon

dans le cadre des portes ouvertes du centre de formation Lemniscate Processus :
voir le programme de la journée ici : www.lemniscate-processus.com

Exposition du 21 janvier au 21 avril 2023 – Visite libre
Ouverture du lundi au jeudi de 14h30 à 18h30 + soirées et week-end en fonction des événements

– adresse : Le Jardin Intérieur – za la Ponche – 4 route d’Avignon – 30320 MARGUERITTES

– contact artiste : Susan Mende 06 18 20 56 10

– contact organisateur : 04 66 26 16 83 – contact@le-jardin-interieur.com